L'iconostase est une cloison d'icônes qui sépare le sanctuaire, où se célèbre l'Eucharistie (qui est le monde divin), de la nef, où se tiennent les fidèles (qui est le monde humain). Elle est le symbole de l'Eglise Orthodoxe.
A l'origine, une simple balustrade, parfois surmontée de rideaux, séparait le sanctuaire des fidèles. Ce n'est qu'à partir de 843 avec la fin de l'iconoclasme et la restauration du culte des images, que les balustrades reçoivent les premières icônes. Dans les pays scandinaves et en Russie, les églises de bois ne pouvaient pas être ornées de fresques comme la théologie byzantine l'avait établi. L'iconostase servit à ressembler tout ce que les décorations murales ne pouvaient pas présenter.
L'iconostase ne se développa véritablement qu'à partir du XIVe siècle. Jusqu'au XIXe, les registres des icones se sont accumulés pour atteindre parfois dix à quinze rangées d'icônes. Le XXe siècle mit fin à cette surenchère pour ne présenter que des iconostases beaucoup moins hautes à un ou deux registres.
L'iconostase classique comprend cinq séries d'icônes.
Dans les églises byzantines, aux premiers siècles du christianisme, les iconostases se réduisaient à une simple barrière de bois ou de pierre, parfois en marbre.
Sous l'empereur Théodose II, il y a la barrière et quatre colonnes sur lesquelles repose l'architrave qui était sculptée d'images symboliques. La barrière, qui était ouverte, était surmontait de la Croix. Un peu plus tard, entre ces deux colonnes, on plaça deux images : l'une de Jésus Christ et l'autre de la Sainte Vierge Marie. |
L'empereur byzantin Justinien I (qui règna de 527 à 567) fit construire douze colonnes, une pour chaque apôtre. Puis furent installées les Portes Royales, à deux battants, qui étaient parfois remplacées par des rideaux, et qui n'étaient ouvertes que pendant l'office religieux.
L'empereur byzantin Basile I (qui règna de 867 à 886) a orné l'architrave par une représentation du Christ.
Deesis
XIIIe siècle
|
Plus tard, on placera une icône du Christ au milieu de l'architrave après la défaite des iconoclastes. Puis à la droite de Jésus-Christ prendra place une icône de la Vierge Marie et à la gauche du Sauveur, Saint Jean-Baptiste. C'est l'icône à trois personnages appelée la Déésis qui veut dire prière, intercession. |
On a placé la Déésis sur les Portes Royales. Cette icône pouvait être peinte sur une seule planche ou sur trois supports distincts. Presque à la même époque, c'est la fin de la rédaction par l'Eglise de son calendrier liturgique jalonné par les douze grandes fêtes du Christ et de la Vierge. Chez les byzantins, on a installé une rangée d'icônes supplémentaire sur la balustrade pour déposer les 12 icônes des Fêtes, peintes sur des planches individuelles, une pour chaque mois de l'année. L'icône du mois était otée de la série et se posait sur un lutrin devant la balustrade.
Les églises étaient encore le plus souvent construites en bois, ce qui interdisait les peintures murales et autres fresques. Les rangées d'icônes avaient un but essentiellement didactique et la hauteur modeste de la barrière permettait aux fidèles de suivre la liturgie.
Nous sommes vers le XIIe siècle et cette balustrade pouvait déjà atteindre chez les byzantins deux ou trois rangées d'icônes (Déésis, apôtres et prophètes, fêtes). A la même époque, les grecs préféraient une seule rangée.
La première iconostase haute connue est celle de la cathédrale l'Annonciation du Kremlin décorée en 1405 par Theophane le grec, Prokhor et Andreï Roublev.
Jusqu'à la fin du XIVe siècle, la hauteur de l'iconostase reste modeste, ce qui ne pouvait pas empêcher les fidèles de voir la liturgie dans le sanctuaire.
Si, vers le début du XVe siècle, il y avait trois séries d'icônes, c'est vers la fin du XVe siècle que l'on vit apparaître la quatrième rangée, celle des Prophètes. C'est à cette époque que débute la construction des grandes cathédrales et les balustrades se tranforment en un mur d'icônes.
Le rôle didactique de l'iconostase n'était pas la seule influence pour cette superposition de séries d'icônes. Les princes moscovites, pour montrer leurs richesses et leur puissance faisaient décorer leurs nouvelles cathédrales en pierre d'iconostases monumentales et surchargées.
Au XVIe siècle, un grade supplémentaire est ajouté, celui des Patriarches de l'église. C'est ce type d'iconostase à cinq étages qui deviendra l'iconostase classique vers le XVIIe siècle.
Le
style baroque de l'iconostase est arrivé en Russie. Le patriarche Nikon avait invité des sculpteurs biélorusses et ukrainiens à venir travailler avec leurs nouvelles techniques. Les sculpteurs hollandais et flamands, qui étaient des virtuoses, sont arrivés par la Pologne. Ces iconostases, "à la mode flamande" , sont ornées de riches sculptures et couvertes de dorure ; l'iconostase de la cathédrale Pierre et Paul de Saint Pétersbourg, avec ses 43 icônes, construite en 1720 en est un exemple. |
Les sculptures
éclipsent
les icônes, la succession des registres n'est plus
respectée, le sens liturgique de l'iconostase est
ignoré. De plus, les icônes ressemblent plus
à des peintures
religieuses qu'à des icônes russes
écrites dans la tradition.
Sous l'influence
russe, les iconostases sculptées voient le jour dans
d'autres pays, comme sur le Mont Athos
ou dans les Balkans ; mais ces iconostases ne dépassent pas
2 ou 3 rangées.
Au XVIIIe siècle, le baroque cède la place au classicisme avec des colonnes austères, des portiques et des entablements avec le rôle des icônes qui est réduit au minimum.
A la fin du XIXe siècle et au début du XXe, il y a un retour vers la forme monoétage avec des barrières en marbre (style byzantin) comme dans la cathédrale de Vladimir à Kiev ou en bois (style ancienne Russie).
Actuellement, chaque église crée son propre projet d'iconostase qui prend diverses formes stylistiques : byzantines, baroques, russes anciennes...
Habituellement, l'iconostase classique comporte cinq rangées d'icônes appelées registres.
C'est la série des icônes locales. Dans cette galerie inférieure de l'iconostase, les icônes du Sauveur et la Sainte Vierge Marie sont placées de part et d'autres des portes royales.
Plus bas, on dispose les quatre evangélistes. Saint Jean et Saint Luc se trouvent sous l'Archange Gabriel, Saint Mathieu et Saint Marc sous la Vierge Marie. Directement au dessus des portes royales se place l'icône de la Cène.
On place généralement une icone de l'Archange Saint Michel.
On place généralement une icone de l'Archange Gabriel.
Il comprend les icônes liées aux événements du Nouveau Testament de la vie terrestre du Christ. Cette série comprend les icônes des Fêtes solennellement célébrées par l'Eglise. Les icônes sont disposées chronologiquement suivant l'ordre du calendrier ecclésiastique.
Il y a 6 icônes pour le Christ : Noël, la Présentation au Temple, l'Entrée à Jérusalem, l'Ascension, la Transfiguration et le Baptême.
Il y a 4 icônes pour la Vierge Marie : la Naissance de la Vierge Marie, la Présentation au Temple de la Sainte Vierge, l'Annonciation et la Dormition.
Deux autres icônes de la Crucifixion sont disposées selon la période de l'année. S'il reste un peu de place, se joignent les icônes de fête de moindre importance comme la Résurrection de Lazare, la Descente aux Enfers, le Noël Christique ou la Trinité.
Le registre de Fêtes et celui du Déésis peuvent être interchangeables. En effet, quelquefois la rangée des icônes des Fêtes peut être le troisième registre.
Le deuxième est la Déisis qui signifie prière ou intercession. Cette rangée présente le Christ en Majesté avec la Vierge Marie à sa droite et Saint Jean-Baptiste à sa gauche.
Le centre de cette série est l'icône du Sauveur en Majesté venu juger le Monde. Il est entouré de la Vierge Marie à sa droite et de Saint Jean-Baptiste à sa gauche. Ils sont suivis par les archanges, les apôtres, les martyrs et tous les personnages ayant le grade de la sainteté.
A droite de l'icône de la Vierge Marie, on peut voir habituellement :
1- l'Archange Saint-Michel ; 2- l'Apôtre Pierre ; 3- Basile de Césarée ; 4- Jean Chysostome ; 5- le moine Zocima ; 6- Saint-Georges
A gauche de l'icône de Saint Jean-Baptiste, il y a :
7- l'Archange Gabriel ; 8- l'Apôtre Paul ; 9- Saint-Grégoire le Théologien ; 10- Saint-Nicolas ; 11- le moine Savvati ; 12- le grand martyr Dimitri
Ce registre représente les Prophètes de l'Ancien Testament de Moïse jusqu'à Jésus de Nazareth. Les Prophètes tiennent dans leurs mains les textes écrits sur des rouleaux qui racontent la naissance du Christ. C'est au centre de cette galerie que l'on trouve généralement une icône de Notre Dame du Signe qui est la liaison entre l'Ancien et le Nouveau Testament.
A droite
de l'icône de La Vierge du
Signe (à gauche pour le
spectateur), on peut voir généralement :
1- David ; 2- Zacharie (le
père du Précurseur Jean Baptiste) ; 3- Moïse
; 4- Samuel ; 5- Nahum ; 6- Daniel ; 7- Hebacue
A gauche
de l'icône de
La Vierge du Signe (à droite pour le
spectateur), il y a :
8- Salomon ; 9- Ezéchiel
; 10- Aggie ; 11- Elie ; 12- Malachie ; 13- Elisée ; 14- Zacharie
La série supérieure de l'iconostase représente les patriarches de l'Ancien Testament d'Abraham jusqu'à Moïse. Au centre de ce registre se place une icône représentant la Sainte Trinité.
Dans les fresques, on retrouve les patriarches au niveau inférieur.
L'iconostase est toujours surmontée de la Croix